Désignation du juge d'instruction / Irrégularité / article 50 du code de procédure pénale

 

Le 29 novembre 2022, Bruno REBSTOCK (Cabinet Rebstock Cerda & Associés) a obtenu de la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel d’Aix en Provence l’annulation de l’ordonnance de dessaisissement rendue par le Président du TJ de Digne-les-Bains ainsi que tous les actes de procédure exécutés, directement ou par délégation, par et au nom du juge d’instruction irrégulièrement désigné, entrainant ainsi la remise en liberté de F.A. après neuf mois de détention provisoire.

Le président du TJ rendait une ordonnance de dessaisissement de l’unique juge d’instruction de la juridiction, au motif que le mis en examen était poursuivi pour des faits de vols commis au domicile personnel de ce juge.

Bruno REBSTOCK soutenait que le Président du TJ n’avait pas respecté les règles de désignation d’un nouveau juge d’instruction imposées par l’article 50 du code de procédure pénale.

La cour de cassation juge qu’il ne peut être dérogé à la procédure de l’article 50 qu’en cas d’urgence et de l’impossibilité de réunir l’assemblée générale des magistrats (Cass. crim., 18 mars 2009, n°08-88.486, Bull. crim. 2009, n°58 ; Cass. Crim., 20 juin 2017, n°17-82.269).

Cela ne résultait pas du cas d’espèce.  

En outre, Bruno REBSTOCK soutenait qu’il n’était pas possible pour le Président du TJ de s’auto-désigner. Si la jurisprudence admet un remplacement temporaire du juge d’instruction ce n’est qu’à des conditions strictes et en dernier recours (Cass., crim., 18 mars 2009, n°08-88.486 ; Cass. crim., 15 novembre 2016 ; Cass., crim., 11 septembre 2019, n°19-83.878).

Le ministère public tentait a posteriori de justifier de l’urgence et de l’impossibilité de réunir l’assemblée des magistrats en invoquant notamment la période de vacation et la nécessité de poursuivre l’instruction, remettant ainsi en cause l’essence même de l’article 50 CPP.

La chambre de l’instruction constatait l’absence de motivation dans l’ordonnance rendue par le président du TJ et relevait que « si la cour peut rechercher les raisons qui ont conduit le président du tribunal à ne pas réunir l’assemblée générale et à viser l’urgence, encore faut-il que des éléments objectifs figurant au dossier permettent d’expliquer et de légitimer ces deux constatations » ce qui n’était pas le cas en l’espèce. Elle jugeait alors que « le seul fait de se trouver dans un tribunal n’ayant qu’un seul juge d’instruction et en période de vacation ne permet pas au président de s’exonérer des dispositions de l’article 50 du code de procédure pénale sauf à motiver cette décision ou à permettre à la cour de l’expliquer ».

Les actes de procédures exécutés directement ou par délégation par et au nom du juge d’instruction irrégulièrement désigné ont été annulés. Ont été ainsi annulés également tous les actes préalables à l’ordonnance de prolongation de la détention provisoire, elle-même annulée.