Extradition vers la Serbie / non respect article 6 CEDH / Avis défavorable

 

Par arrêt du 21 septembre 2022 la Cour d’appel d’Aix en Provence a émis un avis défavorable à la demande d’extradition formée par le gouvernement de la République Serbe à l’encontre de Jovan R.

Le gouvernement serbe demandait l’extradition de Jovan R. pour exécution d’une peine de 20 jours prononcée par le tribunal judiciaire de Belgrade et une peine de 3 ans et 3 mois par la cour d’appel de Belgrade. Ces condamnations sont définitives.

Dans le mémoire en défense présenté par Bruno REBSTOCK et Camille FRIEDRICH (Cabinet REBSTOCK CERDA & Associés) il a été soutenu que l’extradition pour exécution de la peine de 20 jours devait être refusée, la peine étant inférieure au minimum exigé par l’article 2.1 de la Convention européenne d’extradition. C’est en ce sens que s’est prononcée la chambre de l’instruction en rendant un avis défavorable à la demande d’extradition.

Concernant la demande pour exécution de la peine de 3 ans et 3 mois Bruno REBSTOCK et Camille FRIEDRICH ont soutenu que la remise de Jovan R. devait être refusée en ce que la procédure pénale serbe ne respecte pas les dispositions de l’article 6 de la CEDH. En effet Jovan R. et son avocat n’étaient pas présents devant la cour d’appel de Belgrade. L’article 447§2 du code de procédure pénale serbe dispose que seuls la personne poursuivie et l’avocat qui ont indiqué dans le délai prévu pour le recours souhaiter être avisés de l’instance d’appel sont convoqués. Tel n’était pas le cas de Jovan R. et de son avocat. La décision rendue par la cour d’appel de Belgrade en l’absence de Jovan R. et de son avocat est définitive, sans voie de recours.

La Chambre de l’instruction de la Cour d’appel d’Aix en Provence retient :

  • Que l’article 6 de la CEDH n’implique pas le droit de comparaître en personne si l’audience de première instance a été publique et que le débat porte sur des questions de droit et non de fait ;
  • Que le protocole additionnel n° 3 auquel la France a adhéré récemment permet l’extradition si l’Etat requérant garantit un nouveau procès ;
  • Que cependant et concernant la procédure suivie contre Jovan R. bien que celui-ci n’ait pas demandé à comparaître lors de l’audience d’appel, le débat portant aussi sur des éléments de personnalité pour déterminer la peine à prononcer et la décision étant définitive, il appartenait à la Cour d’appel de Belgrade de contraindre Jovan R. à comparaître personnellement.
  • Que la peine ayant été aggravée sur appel du parquet, la décision rendue l’a été aux termes d’une procédure non conforme aux dispositions de l’article 6.

Retenant les moyens de défense exposés par notre Cabinet, la Cour a donc rendu un avis défavorable à la demande d’extradition présentée par la République de Serbie à l’encontre de Jovan R.

(Nous avions déjà évoqué la décision rendue par la Chambre de l’instruction sur le contrôle judiciaire non applicable à l’encontre d’un militaire en fonction. Voir notre actualité du 22 06 2022)