Homicide involontaire / Accident du travail / Obligations particulière de prudence ou de sécurité

Par jugement du 28 mars 2023 le tribunal correctionnel de NANCY a relaxé le prévenu poursuivi pour homicide involontaire en raison d'un manquement à une obligation particulière de prudence ou de sécurité.

Bruno REBSTOCK a assisté R.M. poursuivi du chef d’homicide involontaire suite à un accident du travail : la victime était un employé intérimaire ayant manœuvré une mini-pelle équipée d’un brise-roche hydraulique.

Il lui était reproché la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, d’une part, en ayant embauché ce salarié temporaire sans autorisation de conduire un tel équipement de travail à risques particuliers et, d’autre part, en omettant d’organiser et de dispenser une formation pratique appropriée en matière de sécurité.

Bruno REBSTOCK a rappelé à la juridiction que si en vertu de l’article L. 4141-2 du Code du travail, l’employeur est effectivement tenu d’organiser une telle formation à ses salariés, la cour de cassation juge que cette obligation ne s’applique pas s’agissant des agents intérimaires : l’entreprise de travail temporaire demeure l’employeur des salariés intérimaires au sein de la société bénéficiaire (Civ. 2ème, 24 mai 2007, n° 05-21.906).

Bruno REBSTOCK a également relevé que si le Code du travail impose l’autorisation préalable de l’employeur à la conduite de certains équipements dangereux, les auditions des salariés de l’entreprise ont démontré que le prévenu n’a jamais donné l’instruction ni même l’autorisation à la victime de conduire la mini-pelle. L’usage de cet appareil résulte donc de la seule initiative de la victime sans que le prévenu en soit informé.

La défense avait relevé la jurisprudence la plus récente de la chambre criminelle de la Cour de cassation selon laquelle les dispositions de l’article L. 4141-2 du Code du travail, qui impose la formation en matière de sécurité, ne comporte que des obligations générales de prudence ou de sécurité (Crim., 21 juin 2022, n° 21-85.691).

Or, la répression du délit d’homicide involontaire lorsque le prévenu n’a pas directement concouru à la réalisation du dommage ne peut intervenir, selon l’article 121-3 alinéa 4 du Code pénal, que lorsque celui-ci a violé de de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement. Ainsi, à considérer qu’une faute puisse être reprochée au prévenu, celle-ci n’était pas liée à une obligation particulière, mais seulement générale.

En constatant effectivement que la formation en matière de sécurité était imposée à l’agence d’intérim, que l’usage de l’équipement dangereux était à la seule initiative de la victime sans en informer le prévenu, et que les textes visés au cours de la poursuite relève d’une obligation générale de prudence ou de sécurité, le tribunal correctionnel a relaxé R.M. du chef d’homicide involontaire.

En l’absence d’appel du parquet ce jugement est définitif.